Défis et Sauvegarde dans le Détroit de Gibraltar
Les orques ibériques, majestueux habitants des eaux de la péninsule ibérique, font face à des défis sans précédent. En danger critique d’extinction, ces créatures fascinantes nécessitent des mesures urgentes pour assurer leur survie. Un atelier(1) organisé par la Commission baleinière internationale à Madrid a récemment mis en lumière les interactions complexes entre les orques et les navires, ainsi que les efforts nécessaires pour protéger ces animaux précieux.
La population des orques ibériques a été estimée à seulement 37 individus en 2023, un chiffre alarmant. Bien que la mortalité des nouveau-nés ait diminué, la survie des adultes, en particulier des femelles, reste préoccupante. Ces orques se reproduisent lentement, avec un intervalle moyen de 8 à 10 ans entre chaque naissance, rendant le rétablissement de cette population d’autant plus difficile.
Se nourrissant principalement de thon rouge de l’Atlantique, la disponibilité de cette proie est cruciale pour leur survie. Bien que le thon soit moins menacé qu’auparavant, les activités de pêche posent toujours de graves problèmes. Les orques peuvent s’emmêler dans les équipements de pêche, et certaines pratiques agressives de pêcheurs exacerbent ces dangers. L’utilisation de dispositifs électriques pour assommer les poissons représente une nouvelle menace potentiellement mortelle pour les orques.
Depuis 1996, les chercheurs ont observé et étudié ces orques en utilisant des techniques comme la photo-identification et le suivi par satellite. Ils ont découvert que les orques ibériques ont adopté des stratégies variées pour chasser le thon rouge.
Ces orques montrent également des déplacements saisonniers fascinants. Observées entre février et juillet au large de Barbate, elles se dispersent ensuite vers des régions comme Belle-Île en France, Brest, les côtes de Galice et du Portugal, et le détroit de Gibraltar. Ce comportement migratoire est étroitement lié à la disponibilité de leurs proies.
Depuis mai 2020, une série d’interactions intrigantes et parfois inquiétantes entre les orques ibériques et les bateaux a été documentée. Plus de 673 de ces rencontres ont été recensées, révélant des comportements fascinants mais préoccupants. La plupart de ces interactions (93%) se sont produites sur la côte atlantique de la péninsule ibérique, bien que des incidents aient été signalés de la France au Maroc. En moyenne, ces interactions durent 25 minutes, mais certaines peuvent s’étendre jusqu’à deux heures.
Diverses sources de données ont permis de mieux comprendre ces incidents, incluant des inspections directes de navires et des questionnaires complétés par les équipages. Une application développée par le Grupo de Trabajo Orca Atlántica permet de signaler ces interactions en temps réel, offrant ainsi un outil précieux pour collecter des données.
Les orques semblent avoir une préférence pour les voiliers de longueur moyenne, s’intéressant particulièrement aux safrans de gouvernail. Les motivations derrière ce comportement sont encore débattues. Avec le retour en abondance du thon rouge, les jeunes orques pourraient avoir plus de temps pour explorer et adopter de nouveaux comportements. En période de pénurie de nourriture, elles pourraient aussi se tourner vers des actions plus risquées pour assurer leur subsistance. Mais les orques peuvent aussi être stressées par l’augmentation du trafic maritime. Leur comportement pourrait être une réponse à ce stress ou simplement de la curiosité envers les navires. Certains experts ont suggéré que les orques pourraient avoir été blessées par des navires dans le passé, ce qui pourrait expliquer leur comportement actuel. Mais il faut toutefois préciser que les scientifiques qui ont produit le rapport en question s’accordent sur le fait que ce comportement ne présente pas de caractère agressif, qu’il aurait surtout un caractère socialisant et que parler d’attaques n’est pas approprié.
Pour minimiser les risques d’interactions, il est recommandé aux marins de s’éloigner rapidement des orques à une distance d’au moins 2 à 3 km et d’alerter les autorités dès le début d’une rencontre. Les dispositifs acoustiques ne devraient être utilisés qu’en dernier recours pour éviter que les orques ne s’y habituent ou ne soient exclues de leur zone de chasse et pour réduire la pollution sonore.
La préservation des orques ibériques est une priorité. Les raisons derrière leurs interactions avec les navires sont complexes et encore en cours d’étude, mais des solutions pratiques et non nuisibles sont essentielles pour protéger le peu d’individus restants. Des efforts continus en matière de recherche, de surveillance et de coopération internationale sont nécessaires pour assurer la sécurité et la survie de cette population.
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