Un texte d’Yvon Godefroid
En 2005, le journal San Diego Union-Tribune a fait part de la mort de l’une des orques stars de Sea World, Splash, la « préférée » du parc. Elle bénéficiait d’une équipe de soin spéciale et avait développé des liens très étroits avec les soigneurs. L’article a décrit cette orque de 15 ans comme « l’un des animaux les plus malades du parc ». En 1994, « Splash s’est frappé la tête contre les parois de son bassin. Le choc fut si violent qu’il s’est arraché un morceau de peau de la taille d’un livre près de la mâchoire. La blessure a nécessité une intervention chirurgicale. »
Un des soigneurs de SeaWorld, qui a travaillé avec Splash, John Hargrove, raconte désormais au site The Dodo que Splash était une orque nerveuse et excessivement agressive, morte jeune après avoir ingurgité de grandes quantités de sable, probablement dû à l’ennui inhérent à la captivité. C’est ce qui aurait contribué à sa mort. Toutefois, SeaWorld a refusé de répondre aux nombreuses demandes d’interviews du journal The Dodo pour apporter leur version de l’histoire.
D’après la base de données indépendante qui recense les dauphins et orques captives, Ceta-Base.com, Splash est né le 15 août 1989, à Marineland au Canada, puis transféré au SeaWorld de San Diego à l’âge de trois ans où il est mort en 2005. Si l’on considère l’espérance des vie des orques (on estime qu’une orque mâle peut vivre jusqu’à 60 ans dans son milieu naturel), Splash est mort très jeune.
Hargrove a quitté SeaWorld en 2012 après avoir passé 20 à dresser des mammifères marins. Il est apparu dans le documentaire Blackfish, qui évoque la mort de Dawn Brancheau, soigneuse à Sea World, tuée par l’orque Tilikum, dont on raconte les comportements violents durant ses années de captivité. Dorénavant, Hargrove critique ouvertement SeaWorld depuis la sortie du documentaire, qui vient appuyer les arguments d’un projet de loi en Californie visant à limiter drastiquement le nombre d’orques en captivité. Il prévoit même de témoigner le mois prochain pour soutenir un projet de loi similaire actuellement à l’étude à New York. Hargrove a également fait part au site The Dodo, que Sea World administrait de nombreux médicaments (souvent inefficaces) pour tenter d’enrayer les comportements destructeurs des animaux.
Splash était différent des autres de bien des manières. « Il était épileptique », d’après Hargrove, « nous le traitions avec du phénobarbital ». « L’orque était également traité pour des ulcères et recevait des tranquillisants pour faire baisser son niveau élevé de stress », explique-t-il. « Il était toujours malade et toujours sous traitement médicamenteux. »
Peu de personnes à l’époque se sont posé la question de savoir s’il était sûr de nager avec des orques épileptiques, « mais nous l’avons fait », témoigne Hargrove. L’état de santé de l’orque n’était pas son seul et unique problème. « L’extrême agressivité de Splash a commencé à se manifester quand il a atteint sa maturité sexuelle, dit Hargrove, et les soigneurs se méfiaient énormément de lui.
Une fois même, alors qu’il se préparait pour le spectacle, Hargrove raconte qu’il était assis sur la plateforme, les pieds dans l’eau quand Splash a plongé au fond de l’eau, s’est tourné sur le côté et est réapparu à la surface « en ouvrant grand la gueule au niveau de mes jambes« .
Le soigneur a calmement plongé la main dans l’eau et exercé une manœuvre classique consistant à désigner une cible avec la main afin que l’animal aille la toucher de son rostre. Une fois la tâche accomplie, Hargrove a refermé la gueule de Splash pour lui signaler de partir. « Je ne nageais pas avec lui car il était déjà dans un état d’esprit agressif ».
Et ce n’est qu’un incident parmi tant d’autres impliquant Splash dont Hargrove se souvient. « Une autre fois, j’ai plongé dans l’eau et je me suis positionné sur le dos. Pour les orques, cela signifie qu’elles doivent aussi se mettre sur le dos », explique le soigneur. L’orque est supposée soulever le soigneur. Le soigneur est ainsi idéalement placé au niveau du ventre de l’orque et ensemble, ils glissent autour du bassin.
Splash est venu à la rencontre de Hargrove comme prévu, mais l’orque était en rut et donc imprévisible et dangereuse. « Son pénis en érection s’est placé juste au niveau de mon visage. Il était complètement en rut » dit Hargrove. « Les plus gros problèmes surviennent quand les animaux n’ont que le sexe en tête ».
Il est impossible de savoir ce qu’une orque pense, mais Splash démontrait des comportements étranges, il avalait du sable, par exemple. Pendant plusieurs années, d’après Hargrove, Splash a ingurgité le sable de filtration qui se retrouvait dans le bassin de l’animal.
« Splash s’ennuyait tellement, l’environnement était si stérile qu’il restait là à ne rien faire pendant des heures — il allait de temps en temps à la surface pour respirer, puis replongeait pour avaler du sable », rapporte Hargrove. Ce type de comportement destructeur chronique a uniquement été observé chez les orques captives, d’après les experts, jamais dans la nature.
« Splash a mangé du sable pendant des années », selon Hargrove. « Le sable de filtration est très rugueux et très abrasif ».
Après la mort de Splash, un vétérinaire de Sea World aurait dit à Hargrove que l’autopsie de l’orque a révélé la présence de « dizaines de kilos de sable dans son estomac » et ce n’est pas ce qui l’a tué, « mais ça ne l’a pas aidé ». (La rédaction de The Dodo a contacté le Directeur des services vétérinaires de SeaWorld en Californie, Thomas Reidarson, suite à la mort de Splash. Mais Reidarson a quitté SeaWorld en 2010, et nous a écrit : « En tant qu’ex-employé de SeaWorld, j’ai signé une déclaration de confidentialité au moment de quitter la société, je ne peux malheureusement pas vous renseigner sur cette affaire ».)
Splash a-t-il avalé suffisamment de sable pour se tuer ? Seul un vétérinaire avec les résultats de l’autopsie en main pourrait y répondre, déclare Naomi Rose, chercheuse et spécialiste en mammifères marins au Animal Welfare Institute. Naomi Rose précise que les rapports d’autopsie ne sont plus disponibles au public depuis une modification apportée au Marine Mammal Protection Act (Loi de protection des mammifères marins aux Etats-Unis) en 1994 ; seule une enquête menée par autorité fédérale comme le Animal and Plant Health Inspection Service (Service d’inspection de la santé de la faune et la flore) pourrait refaire sortir ces documents.
Le seul rapport officiel disponible au public, le Marine Mammal Inventory Reports, qui répertorie les mammifères marins en captivité, démontre que la mort de Splash est due à un « ulcère gastrique sévère avec perforation de l’estomac ayant entraîné une péritonite ». Selon Naomi Rose, cela signifie que « Splash souffrait de multiples ulcères qui ont gravement endommagé son estomac et a fini par se perforer ».
Elle déclare ne pouvoir seulement faire des suppositions quant au rôle du sable dans la mort de Splash. « S’il avait beaucoup de sable dans l’estomac, déjà fragilisé par les ulcères, cela ne l’a surement pas aidé. Je ne peux pas affirmer que c’est bien le sable qui a perforé son estomac, mais si ce n’est pas le cas, il a probablement empiré son cas en l’avalant ».
Qu’en est-il de l’épilepsie de Splash ? « Son état de santé est-il responsable de sa mort ? « Très certainement », répond Rose. « Encore une fois, ce ne sont que des suppositions car je n’ai pas assez d’informations pour tirer des conclusions précises sur cette affaire. » Elle ajoute qu’il y a de “fortes chances” qu’il n’aurait pas souffert d’épilepsie s’il était né dans son milieu naturel ». Dans son livre Death at Sea World, David Kirby rapporte que Splash est né prématuré en captivité et a développé son épilepsie plus tard. « Mais j’ai entendu dire que certaines orques en liberté développent des comportements « étranges » mais elle sont prises en charge par le groupe. L’orque A27, une des orques que j’étudiais, a vécu jusqu’à 30 ans, ce qui est assez classique chez les orques mâles en liberté. Je ne dis pas qu’il était épileptique mais il frappait bizarrement sa nageoire caudale et sa croissance semblait perturbée ».
Nous ne saurons probablement jamais ce qui a causé la mort de Splash, mais nous savons ce qu’ils ont fait de son corps. D’après le Union-Tribune :
« Plusieurs organes et des échantillons de peau de Splash ont été donnés pour la recherche scientifique. Son sperme a été envoyé à l’Université de California Davis. L’Université d’Etat de San Diego a aussi reçu des échantillons de peau prélevés sur ses nageoires. Des échantillons de graisse ont été envoyés à l’Université de Central Florida. D’autres chercheurs ont voulu étudier les yeux de l’animal. Le reste de la carcasse a été envoyé à une usine d’équarrissage ».
La captivité des mammifères marins rapporte énormément d’argent à SeaWorld et autres parcs aquatiques malgré les innombrables preuves attestant que la captivité induit des comportements non naturels chez les animaux et met les soigneurs en danger. Rejoignez-nous et engagez-vous à ne plus jamais vous rendre dans ce genre de parcs aquatiques jusqu’à ce qu’ils aient vidé les bassins de tous les dauphins et les orques.
Source : The Dodo
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[…] les dents à ronger tout ce qu’ils trouvent (paroi, barreaux, etc.). L’orque Splash en est un bien triste […]
[…] ni comportements suicidaires et que les comportements névrotiques (ingérer le béton des bassins, avaler du sable, hyper-sexualité, comportements auto-mutilatoires…) ne sont pas quasi-systématiques, et ce malgré les […]
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